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     36 - Muse.

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    Atticus

    Atticus

    Messages : 203
    Date d'inscription : 08/01/2011
    MessageSujet: 36 - Muse.   36 - Muse. EmptyDim 9 Jan - 16:54
    Mihaïl Egonov



    Zdravka gratte à la porte en gémissant. Si elle continue, elle passera au travers.
    Me lever me semble une expédition si ardue... Je me sens tellement bien, là maintenant, dans mon lit bien chaud, comme si cela faisait une éternité qu'il ne l'avait pas été. J'ai l'impression d'avoir une enclûme dans le crâne et un arrière-goût de citron dans la bouche, ça ne m'étonnerait pas d'avoir piccolé plus que de raison avant de me coucher... Me connaissant, j'ai dû me lamenter sur mon sort et détruire le moral de ma chienne.
    Je me sens terriblement seul sans Lui... Je ne voulais pas l'admettre, mais c'est plus fort que moi, Il me manque et ça me fait mal.
    Je l'ai bien cherché, je crois.

    Toutefois, ce réveil me semble nettement moins difficile que les autres. C'est si bon de se vautrer dans ses draps. Dans un soupir de bien-être, encore un réflexe inutile et humain, je me prélasse dans mon plummard et ouvre enfin les yeux, nichant mon visage fatigué au creux... d'une jolie poitrine au teint d'albâtre, jeune et ferme, toute douce sous ma joue râpeuse.
    En dormant, j'ai emprisonné son corps dans mes bras. Une main logée dans sa nuque, doigts éparpillés dans ses cheveux longs. L'autre perdue dans sa chute de reins. Qui est-elle ?
    Pas de panique, Mihaïl...

    Lentement pour ne pas la réveiller, je lève le menton en direction de son visage, caressant des yeux sa gorge fine et les courbes harmonieuses de ses épaules. Des souvenirs me reviennent en mémoire et je me revois couvrir cette peau de baisers, enflammé par sa beauté et quelques verres de tequila.
    Elle semble dormir encore, paisible. Je ne me rappelle même pas son nom. Me l'a-t-elle seulement dévoilé ?
    Sait-elle que je suis un mort ? S'enfuirait-elle en le découvrant ?
    Je la serre un peu plus contre mon corps froid. T'en vas pas, reste avec moi...

    Le front contre son coeur, j'en écoute les pulsations régulières qui alimentent sa vie. Edwin avait raison, cette chaleur humaine finit par manquer...
    Je referme les yeux, bercé par cette apaisante rythmique. Et malgré la migraine, je creuse dans ma mémoire pour me souvenir de la veille.

    Je l'ai trouvée grâcieuse, pleine de vie. Au-delà de son regard profond et de son visage d'ange, son caractère m'a fait sourire, et le courant est très bien passé. Surtout après un verre ou deux, quand l'alcool a réchauffé l'atmosphère, et que j'ai enfin ouvert la bouche pour répondre plus d'une phrase à ses questions. Désespérant, quand j'y pense, ce qu'il ne faut pas faire pour m'arracher quelques mots.

    Aarwen, c'est son prénom. Une âme d'artiste incontestable, je crois que c'est ce qui nous a rapprochés. Je sentais dans ses mots une telle passion que je ne pouvais pas la laisser filer, je me suis accroché à notre longue conversation une bonne partie de la soirée, accoudé au comptoir du bar, et... là, quelques incohérences, des trous dans ma mémoire, je ne me rappelle plus très bien. Je visualise le moment précis où nous avons franchi ma porte, ensuite quelques bribes de souvenir me racontent de quelle agréable manière nous avons fini la nuit.
    Tiens, c'est la première fois que je ramène quelqu'un chez moi...

    Essayant de ne pas la réveiller, je ramène à moi l'un de mes bras, pour me masser les yeux avec les doigts. Quelle nuit de folie, j'ai la tête en compote...
    Avec toute la délicatesse du monde, je la libère de mon étreinte et me redresse dans le lit. J'attrape un caleçon et un pantalon noir dans mon placard pour m'en revêtir, avant d'ouvrir la fenêtre et les volets, laissant un peu de lumière lunaire s'infiltrer dans la pièce sombre. La silhouette d'Aarwen se dessine dans la clarté froide projetée sur le drapé qui la recouvre. Adossé à l'encadrement, je la contemple un instant, me disant que si je savais dessiner, je prendrais cette scène pour modèle. Mon ombre n'étant plus projetée, je ne serais même pas gêné en m'installant ici, juste sous le faisceau.

    Soyons fous, je vais essayer. Fouillant dans un tiroir, j'en sors un calepin et un crayon.
    Premier essai raté. Le trait tremblottant, je l'ai complètement déformée. Second essai, de meilleures proportions, mais le drapé ressemble à une feuille de laitue.
    Je froisse les croquis les uns après les autres et les balance de l'autre côté de la pièce.
    Frénésie artistique. J'ai besoin de créer, cette jeune femme m'inspire.

    Je n'ai jamais su dessiner, je suis tellement maladroit avec un crayon, ou un pinceau... Quand j'étais tout petit, à l'école, je passais plus de temps à pourchasser mes camarades de classe avec les doigts plein de peinture, plutôt que de l'appliquer sur le papier. C'était de l'art, mais l'institutrice n'avait pas l'ouverture d'esprit pour le comprendre, et à force de punitions j'ai refoulé le grand peintre qui germait en moi.
    Heureusement qu'il y avait la musique.

    Zdravka continue de gémir de l'autre côté de la porte, elle sait que je suis réveillé. Elle attendra.
    Balançant un énième croquis raté, relevant le visage vers Aarwen, je croise enfin son regard éveillé. Ne sachant vraiment que lui dire, je baisse mon calepin et lui adresse un sourire.

    - Bonsoir... Bien dormi ? Désolé, je n'ai ni thé ni café, j'ai pas l'habitude d'avoir des invités...

    ... Aussi charmants, en particulier.
    Puisses-tu ne pas regretter d'entrer dans ma sombre et désespérante existence. Si depuis notre rencontre, je semble ne plus avoir d'idées noires, cela m'étonnerait que ça s'éternise...
    _________________


    Aarwen Redwan


    Doux sommeil, doux réveil…
    Sensations étrangères, odeurs inconnues…
    Aarwen se berce dans son rêve, un rêve agréable où se mêle caresse et volupté.
    Un sommeil doux, paisible pour la première fois depuis longtemps, sans cauchemars, sans cris, sans larme.
    Un sommeil duquel elle n’a aucunement l’intention de sortir.

    Alors que les brumes opaques de ce repos bien mérité s’estompent… De nouvelles sensations viennent la sortir totalement des limbes de son esprit…. Du creux confortable des bras de Morphée, des bruits qui ne lui sont pas familiers titillent ses oreilles. Les grattements de pattes à la porte, l’impression subite d’avoir froid soudain dans le grand lit… l’air frais du soir venant effleurer de son souffle la peau nacrée de l’humaine.
    Des pas…lourds sur le sol… du moins lui semble-t-il.
    Mais depuis quand son maître possède un chien ?

    Cette remarque consternante la réveille totalement pour du coup et ses yeux jusqu’alors paresseux s’ouvrent d’un coup.
    Un *Merde, mais qu’est-ce que je fous là* des plus poétiques explose dans sa tête.
    Elle n’est pas dans les appartements d’Arzheid, elle n’est pas dans sa confortable petite chambre et elle ne se souvient pas de la manière avec laquelle, elle est arrivée là. Seule une migraine significative lui murmure sournoisement qu’elle n’a pas du boire que de l’eau. Elle n’ose bouger et observe en silence les allées-venues du propriétaire des lieux. Elle remarque qu’il fait déjà nuit dehors, elle a dormi toute la journée dans les bras d’un parfait inconnu.

    A cet instant, elle oscille entre fou-rire nerveux et inquiétude.
    Combien de temps ce genre de situation ne lui était pas arrivé, des siècles ? Dans une autre vie ? Non quelque mois seulement… alors qu’elle menait sa grande vie d’artiste, une vie bien remplie rythmée par des sorties en tous genre, des soirées mémorables, une vie qui lui manque énormément.

    Légèrement déphasée, elle tente de se rappeler les évènements de la veille.
    Dur... dur, quelques brides seulement font leur apparition dans son esprit brouillé par les effluves de l’alcool. Une chose est sûre, elle a bu…trop même.
    Elle a l’intime certitude qu’elle a affaire à un vampire. Elle se rassure en se disant que s’il avait voulu lui faire du mal, il lui en aurait probablement déjà fait…

    L’air de rien, elle fait semblant de dormir, le détaillant du regard, les pièces du puzzle de la soirée reviennent petit à petit prendre place dans sa mémoire.
    Il en manque quand même quelques-unes…

    Elle se souvient être arrivée au bar assez tôt dans la soirée, son seul et unique but étant à cet instant d’oublier les dernières semaines écoulées, boire, s’oublier elle, oublier l’endroit où elle se trouvait. Elle avait bien réussi finalement, car elle avait un mal fou à se remémorer le déroulement du reste de la nuit. Mais visiblement la suite avait eu un goût d’imprévu.
    Elle était donc entrée, sûre d’elle et de ses envies et elle l’avait vu, appuyé au comptoir. Pas besoin d’être devin pour voir qu’il broyait du noir.
    Et puis quoi ? Naturellement, ils avaient engagé la conversation, les verres avaient commencé à défiler devant eux… déliant les langues, les rancœurs, les confidences.

    Elle se souvient maintenant, il a un prénom à consonance russe, ressemblant à Michel, Michaël… Mihaïl, oui c’est ça Mihaïl… C’est un musicien… enfin, c’est ce qu’elle croit… c’est ce qu’elle se rappelle, mais tout semble encore si confus.

    Une rencontre passionnée et passionnante entre deux âmes blessées. Ils avaient parlé musique, une partie de la nuit… et l’alcool avait continué à couler, arrosant et réchauffant joyeusement le gosier et le corps de nos deux protagonistes…

    Finalement, ces deux là avaient du se trouver…

    Cette fois impossible de lui cacher son réveil. Leurs regards se croisent et elle esquisse un sourire. L’angoisse s’est plus ou moins évaporée…enfin en partie du moins, il reste quand même quelques zones d’ombres, mais force est de constater qu’ils avaient du finir leur nuit dans une étreinte des plus passionnées.

    Comme elle n’a plus à se cacher, elle s’assoit doucement dans le lit, sans pour autant le quitter du regard. Elle grimace un instant, son mal de crâne se rappelant à son souvenir… Et elle se met à masser ses tempes pour se soulager, du moins pendant un moment.


    « Bonsoir ! Oui je reconnais, j’ai étrangement bien dormi…et vous…toi ? »

    Elle est nue sous les draps, s’en rendant compte, elle jette un œil rapide dans la pièce à la recherche de ses vêtements épars. Où, elle se trouve, elle n’aperçoit que son jean en boule dans un coin et une seule de ses chaussettes… *génial !* Plus qu’à prendre un air détaché et détendu et jouer celle qui traîne au lit pour le plaisir.

    Et puis elle aperçoit le calepin.

    « Tu dessines également ? Je peux voir ? »

    Il fallait bien faire la conversation, histoire que la situation ne se mue pas en moment gênant, maladroit et honteusement… banal…
    Non, non, tous deux méritaient beaucoup mieux que ça.
    Sans attendre sa réponse, elle se glisse sur le bord du lit, s’enveloppant dans les draps et s’approcha de lui pour voir les fameux croquis.
    Puis elle sort en riant, parfaitement à l’aise… comme s’ils connaissaient depuis longtemps.

    « Dommage pour le café… il n’aurait pas été un luxe. Peut-être pourrions-nous en commander aux cuisines du château ! Après tout, il faut bien qu’elles servent à quelque chose. »


    La jeune femme sentait qu’elle aurait besoin de sa dose de caféine… histoire de faire passer… les relents alcoolisés toujours présents dans sa tête et pesant lourdement sur ses yeux… bref, elle ne se sentait pas vraiment à son avantage….
    _________________

    Mihaïl Egonov



    D'habitude... c'est moi, qui suis gêné.

    Il aurait été à sa place, il serait parti en courant sans même chercher à retrouver ses vêtements. Se souciant très peu de se jeter en pâture aux moqueries des couloirs.
    Evidemment, il aurait percuté la chienne en sortant de la chambre, hurlé d'effroi devant son impressionnant gabarit, avant de se rouler en boule dans un coin, en attendant qu'Edwin vienne le chercher.
    Pathétique, quoi.

    Aarwen ne semble pas vraiment rassurée de se retrouver dans un appartement inconnu avec un inconnu, et il y a de quoi. Le nid de Mihaïl n'est pas franchement accueillant par sa décoration, autrement dit quelques effets personnels éparpillés, des tonnes de lettres inachevées, froissées et jamais envoyées, et aucune couleur réjouissante si ce n'est un pantalon rouge sang qui traine sur un dossier de chaise. Plus rassurant pour lui qu'un nid, une tombe, et le thème de son requiem dispersé ci-et-là en partitions.
    Tout est noir & blanc, comme le locataire. Il se sent en sécurité dans ce qui le reflète, paradoxal quand on sait qu'il exècre sa propre personne.

    Il sent qu'elle se méfie de lui. Il peut aisément la comprendre. Lui-même n'est pas un habitué de ce genre de situations. Il lui arrive de boire un peu trop, parfois, c'est vrai... Mais souvent, il finit seul et triste, dans son univers triste, dans une triste chambre d'hôpital.
    Ou la sienne tout simplement. Il ne manquerait plus qu'il essaye de se suicider à chaque fois qu'il piccole.

    Elle se rapproche, enveloppée dans les draps si sombres qu'ils rendent sa peau lumineuse, chastement dissimulée à son regard. Comme si la gueule de bois avait pu effacer le souvenir de cette étreinte, la rendant de nouveau inaccessible. Ca le fait sourire, discrètement. A chaque fois qu'il rencontre ses prunelles brillantes, il se rappelle les voir glisser sous ses paupières. Il se souvient de ces lèvres humides et délicates dont il se délectait, de ces doigts, désormais fermement accrochés à sa vertu, qui réchauffaient son dos glacé en cruel manque de tendresse.
    Perdu dans ses pensées, le visage légèrement penché lors d'une contemplation quasi-inconsciente, il est à deux doigts de se rapprocher d'elle, de glisser ses mains sur sa gorge frêle, et de lui faire l'amour à nouveau, parfaitement conscient de ses actes. Au moins, il ne regrette rien.
    Ce n'est que lorsqu'elle lui adresse à nouveau la parole qu'il émerge des cases vides de sa mémoire qui laissent place à son imagination.

    Il baisse le regard vers ses gribouillis.

    - Oh, c'est franchement pas terrible, marmonne-t-il dans un murmure à peine audible.

    Un peu honteux de ses esquisses maladroites, il hésite d'abord, puis finit par lui montrer les quelques uns qu'il n'a pas encore froissés.

    - Te fatigues pas à faire un compliment, je n'ai aucun talent.

    Du moins pas assez pour la représenter telle qu'elle est, d'ailleurs comment pourrait-il y arriver ? Ils se connaissent si peu. Et lui taper la causette, demander combien elle a de frères et soeurs, lui faire avouer ce qu'elle a enduré ici, c'est au-dessus de ses forces. Si elle pense trouver en cet inconnu quelqu'un à qui parler, elle sera rapidement déçue.
    Tout ce qu'il sait faire, en dehors de faire du mal au gens, c'est...
    Son regard oblique vers l'étui de son violoncelle. Depuis sa mort, il ne l'a pas ouvert. Se divertir, accéder à son petit monde, lui donnait envie de vomir quand ce n'était pas pour le dédier à son Autre ou à sa mère. Et cette nuit enfin, une terrible frénésie musicale le démange à tel point qu'il en tremble.
    A nouveau, il observe Aarwen dont l'oeil expert examine les croquis. Il n'osera jamais penser qu'elle n'est qu'un déclic. L'inconnue, il s'y est visiblement attaché. Pour l'avoie amenée dans sa tombe, même ivre, il devait vraiment avoir envie d'elle à ses côtés, au minimum le temps d'une journée.

    Il se secoue intérieurement, décidant de réagir à sa suggestion. Décidement, se remettre les idées en place n'est pas chose aisée cette nuit. Le goût de leur beuverie flotte encore dans sa bouche et ses neurones en pagaille. Ce qu'il ne donnerait pas pour un café, lui aussi...

    - Très juste, pour le café, je n'ai pas eu le réflexe. Je m'en occupe. Fais comme chez toi, prends une douche si tu veux, précise-t-il en désignant la porte de la salle de bains.

    Il s'éloigne à regret de ce coeur vivant qui diffuse de la chaleur juste à côté de lui. Machinalement, il attrape un tee-shirt, un vieux chandail ultra-large (dois-je en préciser la couleur ?) et les enfile. Il ouvre la porte, s'apprêtant à sortir de la chambre pour aller téléphoner, lorsque Zdravka se dresse soudainement de toute sa hauteur pour déposer ses pattes velues sur son torse, aboyant, remuant de la queue. Elle tente de se frayer un chemin entre les jambes de son maître pour se jeter dans la chambre à la rencontre d'Aarwen, mais le russe la retient de justesse par le collier. C'est pas le moment de l'effrayer, elle ne semble pas très à l'aise avec les vampires, alors avec les chiens vampires...

    Il lui adresse quelques mots de russe puis referme la porte derrière lui pour rassurer Aarwen. Zdravka n'est pas un monstre, elle est seulement protectrice à outrance à l'égard de Mihaïl, ce qui risque de compliquer les choses. Jalouse serait un terme plus adéquat.
    Il s'empresse d'aller lui remplir sa gamelle de sang, histoire qu'elle se tienne tranquille un moment.


    Un quart d'heure plus tard, la lumière a été allumée, le chauffage spécialement mis en route. Le petit déjeuner est sur la table. Une boîte de pains au chocolat entre un bol de café et un bol de sang. Les lèvres trempant dedans, Mihaïl relève le regard au-dessus de la surface du récipient, croisant les prunelles de son invitée. Il ne parle pas. Pour quoi dire ? Il n'en a pas envie. Si elle lui a posé une question, il n'a sans doute répondu que oui ou non.

    - Désolé, je ne suis pas du genre causant...

    Ouais, y'a que l'alcool et la haine qui me font parler.

    - J'espère pour toi que ton maître ne verra pas d'inconvénient à ton absence.

    Tu pourrais rester ?... Oui, c'est cela qu'il a envie de lui demander. C'est étrange, ce besoin de compagnie qui le travaille, il n'a pas envie de refermer la porte derrière elle. Et ce n'est pas un souhait purement égoïste, d'ailleurs il s'en félicite. Il n'a pas envie qu'elle se fasse déchiqueter là-dehors, par un plus fou que lui.
    Qu'on rentre dans sa vie ou dans son lit, on n'en sort jamais vraiment, c'est comme ça. Peut-être bien qu'il s'attache trop vite, souvent trop fort. Il est possible que cela se retourne contre elle.

    La plupart des gens le dégoûte et pourtant Aarwen lui inspire une tonne de bonnes choses. Il repose enfin son bol sur la table, rassasié, l'esprit un peu plus dégagé. Et une idée lui vient, qu'il a rarement proposée. L'idée d'inviter une autre forme d'art dans son petit monde musical. Il s'est rappelé qu'elle dansait.
    Une fois le repas terminé, Mihaïl se lève, entrepose la vaisselle dans l'évier en enjambant Zdravka affalée à même le carrelage de la cuisine. La chienne fixe l'humaine, une lueur de défi et de méfiance dans le regard. Mais si elle ne voulait vraiment pas de sa présence, cela fait longtemps qu'elle l'aurait fait comprendre.
    Le néonate retourne dans sa chambre à grands pas, fouille dans un placard et revient avec l'étui peu encombrant d'un violon qu'il a façonné de ses propres mains il y a quelques mois. Il préfère de loin le violoncelle, plus profond, plus chaleureux... mais tellement contraignant à transporter.

    - Viens avec moi, j'ai quelque chose à te montrer... Si tu le veux bien.

    Il l'entraine avec lui, de couloirs en couloirs, d'escaliers en escaliers. Il n'en finissent pas de descendre les étages, jusqu'à se retrouver dans les galeries souterraines du manoir, tortueuses et torturées par le temps. Mihaïl a souvent erré entre ces parois froides et abruptes, se perdant régulièrement, écoutant résonner ses pas, se laissant porter par le hasard qui le ramenait finalement chez lui.
    De temps à autre, il adresse un regard, voire même un sourire à Aarwen, pour lui faire comprendre qu'il n'est pas un affreux psychopathe qui l'emmènerait là pour la tuer, et qu'il sait parfaitement où il va. Il connait bien ce chemin, il est déjà passé par là. Au bout d'un moment, ils viennent enfin à franchir le seuil d'une immense crypte, aux voûtes en arcs brisés taillées dans la roche, décorée de tentures encestrales rongées par le temps, les bactéries et la poussière. Une salle de réception oubliée de tous, appartenant un instant à quiconque découvre de ses yeux sa splendeur et la mélancolie du passé qui s'en dégage. Mihaïl y a déjà vu danser sa mère dans un rêve, il a imaginé toutes les merveilles du monde réunies ici. Les orgies et autres festins sanguinaires sont bien loin de son esprit.

    - J'adore venir ici, avoue-t-il en s'agenouillant sur un tapis pour ouvrir son étui, découvrant son oeuvre de lutherie teintée de noir et laquée.

    Il réaccorde son violon, retend les crins de son archet et dépose l'instrument au creux de son épaule, prêt à jouer. Une nouvelle fois, il regarde Aarwen.

    - Ca t'inspire quelque chose ?

    Danse, jolie petite chose, danse. J'accrocherai des notes à tes pas.
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